Sur la route du Jazz

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YUSEF LATEEF/ LE POST BOP

Il était l’un des grands artisans du Post Bop.

Yusef Lateef saxophoniste et flûtiste, participe à ce Jazz épris de spiritualité et de couleurs orientales.

En 1957, le saxophoniste enregistre « Jazz For The Thinker » qui commence par le morceau « Happyology » aux inspirations Africaines.

Empreint de la tradition celle du Blues, Yusef joue un Hard Bop cool à l’image de « O’Blues » ou de « Polarity ».

La délicatesse est de mise sur l’album intitulé « The Sounds Of Yusef » enregistré la même année chez Prestige. Le solo respire, les notes se tissent avec une grande finesse, sur le walkin bass, les accords de piano et la tourne de batterie.

Les notes de piano sautillent et toutes en swing vous feraient presque danser. La trompette de Wilbur Harden s’envole elle aussi, crée cet espace et cette légèreté dans les phrases.

Au second morceau, le climat est plus aventureux. Les musiciens vous font voyager vers des horizons insolites. La percussion joue un rythme synonyme de mystère sur lequel la flûte se pose en douceur. La musique est presque hypnotique. Toujours dans la même ambiance, les sonorités s’extraient du Jazz à proprement parler.

Yusef prend le ténor au cours de la composition « Buckingam ». Le thème est de trente deux mesures.

De la douceur sur ce morceau final qui porte bien son nom. Intitulé « Méditation », le ténor en conversation avec le pianiste déroule de belles notes romantiques et mystérieuses.

« Jazz Mood » est en fait le premier disque enregistré et publié en 1957 sur le label Savoy. Sur fond de couleurs exotiques, la flûte et le trombone s’enlacent sur le thème « Métaphor » aux pointes orientales.

Le flûtiste avait un sens fort de la mélodie. Plus Soul Jazz est le morceau « Yusef’s Mood ». Le piano envoie des plans Bluesy. Le tromboniste Curtis Fuller chemine de notes en notes graves et suaves. L’année 1957 est très prolifique, puisqu’on dénombre huit sessions.

Empreint de Soul et de Blues Yusef Lateef allait explorer certains horizons sonores Orientaux. À ce sujet on entend ces accents sur « Passion », premier thème du disque « Before Dawn ». Le romantisme est présent sur le second thème.

Le titre « Constellation » est joué à très grande vitesse si bien que les notes de saxophone font tourner la tête.

En 1960, il publie « The Centaur And The Phoenix » un album où le jeune Kenny Barron est arrangeur et qui regroupe une section cuivres de haut rang. À la trompette on a Richard Williams et Clark Terry, au basson Josea Taylor, Curtis Fuller au trombone, Tate Houston au baryton et au piano Joe Zawinul. Les thèmes sont mélodieux emplis de Soul et arrangés avec subtilité.

Le disque s’ouvre par un Blues mineur intitulé « Révélation » au cours duquel le saxophone prend le premier solo. La trompette très légère survole la rythmique avec des notes magnifiques. Le saxophone baryton lance des notes lourdes, avant que le trombone ne déroule des notes aérées.

Le voile des cuivres mené par la flûte en introduction du titre « Apathy » est très beau.

Là encore, les improvisations sont des déroulés de notes fluides et mélodiques.

Les voix des différents soufflants s’assemblent avec subtilité comme on peut l’entendre sur « Every Day I Fall In Love ».

« The Centaur And The Phoenix » est un thème dont se dégage l’optimisme et la joie. Avec la sonorité orientale, le saxophoniste flûtiste démarre sa composition « Iqbal » une musique apaisante. Le basson sanglote au cours d’un solo déchirant.

La flûte est d’une légèreté absolue sur « Summer Long » avec en fond une confection de cuivres toute en finesse.

Plus tard en 1961, le disque « Eastern Sounds » publié chez Prestige constitue un tournant dans l’esthétique. Yusef Lateef joue d’ un instrument rares et insolite, un cuivre qui a des sonorités orientales. Le disque s’ouvre sur une mélodie très joviale sur laquelle le pianiste Barry Harris explore de jolies phrasés.

Bluesy est le second thème aux accents orientaux.

Le saxophoniste compose « Ching Miau » un thème aux couleurs asiatiques.

À la dimension romantique de de morceau, le soprano donne à « Love Theme From Spartacus » une sensation de profondeur d »élévation.

Yusef Lateef peut jouer le Jazz avec du Blues et de la Soul et jouer des séquences éprises de spiritualité.

La sensibilité, la poésie et la tendresse se retrouvent dans sa musique comme sur thème « Purple Flower ».

En 1964, il enregistre le « Live At Pep’s » qui sortira en deux volumes. Le concert commence par « Sister Mamie » avec un instrument qui crée de la tension. La contrebasse et le piano déroulent une tourne sombre et noire. « Number 7 » plus Be-Bop laisse entendre la grande technique du trompettiste Richard Williams.

Le saxophoniste aime aussi les rythmes latins comme sur le morceau « Oscarlypso ».

Du thème medium cool « Rogi » se dégage un swing qui donne la pêche et la joie.

Sur le morceau « The Magnolia Triangle » Yusef se rapproche du Free en utilisant le oboe, le shenai ou l’argul, des instruments traditionnels de l’Orient. La métrique en 5/4 peu utilisée est une originalité.

La musique est souvent mystique avec cet artiste.

« Brother John » est une composition dédiée à Trane. Le 12/8 donne de l’énergie au morceau. La lumière apparaît lorsque le thème démarre par des instruments traditionnels.

En 1965 son album « Psychidemotus » est peut être celui que je retiendrais.

La contrebasse lance une tourne que la batterie ponctue de frappes en finesse. La flûte s’élance sur les voicings qui expriment le mystère.

Sur « Bamboo Flûte Blues », le Blues toujours lui s’échappe de la flûte de Yusef, dont le motif est enveloppé de la contrebasse et par les les accords de piano.

Le saxophoniste est habité par une terrible fougue Coltranienne au cours du morceau « Semiocto ».

Le son, les phrases sont d’un grand sens esthétique sur le morceau « Why Do I Love You ». Il reprend ensuite la première « Gymnopedie » d’Erik Satie qu’il joue à la flûte.

En 1966, Yusef enregistre « Golden Flute » un album sous le signe de la Soul.

En 1968 « Blue Youssef » est plus Roots. On y entend les racines du Blues. Le morceau « Tell Like It Is » repose sur une tourne simple qui sonne plus Soul. On entend l’haronica sur le morceau « Back Home »

En 1969 « Yusef Lateef’s Détroit Latitude 42 30 Longitude 83 ». L’album peut etr qualifié de plus smooth à l’écoute de « Livingston Playground » joué au saxophone ou encore « Eastern Market » à la flûte.

« That Lucky Old Sun » est une ballade qui conclut cet album dans un climat cool.

Le saxophoniste réalisa un grand nombre de disques dans les années 70. Yusef Lateef publia « Suite 16 », un album qui se trouve dans cette mouvance de la Soul presque Funk. On y trouve comme sidemen, les guitaristes Eric Gale et Earl Klugh.

Au cours de cette session, le saxophoniste composa une suite en six mouvements dont le troisième est un solo de saxophone sur un tempo up.

On notera aussi des albums qui doivent à coup sûr être intéressants, comme ceux qu’il enregistre au début des années 90 avec Archie Schepp, Von Freeman ou encore avec Ricky Ford.

La période la plus intéressante de Yusef Lateef est selon moi celle qui va de 1957 à 1966. Pouvant atteindre le spirituel, le saxophoniste jouait aussi une musique proche de la Soul et du Blues. Sur les tempos rapides, il maîtrisait le langage Be-Bop.

Nous n’avons pas parlé des enregistrements auxquels il participa en tant que sidemen mais il fut très sollicité par ses pairs comme Cannonball Adderley ou Charles Mingus.

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