Au fil de notre exploration des différents courants de cette grande musique du Jazz nous découvrons des albums exceptionnels et faisons connaissance avec des artistes qui ont marqué l’histoire du Jazz.
Le pianiste Paul Bley né en 1932 né au Canada occupe une place majeure dans la tournure du Jazz à la fin des années 50, quand les musiciens biberonnes au Be-Bop tentent des explorations nouvelles avec le Cool et le Free.
Son premier album, il l’enregistrera en 1953 entouré de Charles Mingus et du batteur Art Blakey.
La même année, il accompagnera le génie l’inventeur du langage moderne le Be-Bop, Charlie Parker.
Sur l’album enregistré avec Mingus et Blakey on entend les couleurs du Blues. Il a un style raffiné lorsqu’il plaque les accords et interprète les mélodies. Sa version de « Like Someone In Love » est romantique mais on entend chez ce jeune pianiste le désir d’exploration. Sa version de « Split Kick » d’Horace Silver, laisse entendre des phrases ensoleillés.
L’enregistrement « The Complete Live At Hillcrest Performance » marque un tournant dans la carrière du pianiste âgé de vingt six ans seulement. À ses côtés, Don Cherry Ornette Coleman , Billy Higgins et Charlie Haden sont là pour participer à ce changement d’esthétique. Cet enregistrement est un manifeste une revendication de changement de direction.
Sur leur version du morceau de Charlie Parker « Klactooveesedstene », le saxophoniste alto s’aventure souvent vers les ruptures rythmiques des phrases out alors que le trompettiste Don Cherry reste plus dans les cadres.
A cette époque, Paul Bley jouera aussi avec Chet Baker qu’il retrouvera en 1985 pour le magnifique album gravé chez Steeplechase « Diane ».
Plus tard, entre Mai et Août 1960, le pianiste participe à des sessions dirigées par le compositeur et arrangeur George Russell Il faut écouter les échanges avec Bill Evans.
Les deux pianos vont chercher des intervalles absolument hors du commun au milieu des nappes de cuivres. Les respirations sont nombreuses et les directions que prennent les pianistes sont étonnantes. Avec George Russell père de l’harmonie atonale et inventeur du lydien chromatique, les expériences harmoniques sont pour l’époque très avancées.
Le pianiste formera un trio avec Steve Swallow et Jimmy Giuffre.
Tous trois réaliseront un album intitulé « Trugdin, Ictus, Emphasis » où chacun s’observe avec bienveillance pour atteindre des tensions des choses fragiles au niveau sonore. L’écoute réciproque est fondamentale dans cette nouvelle esthétique. Le fruit de cette rencontre laissera peu de disques, mais aura une influence considérable sur des musiciens comme le saxophoniste Evan Parker.
Paul Bley fera connaissance avec le contrebassiste Gary Peacock au sein du quartet du trompettiste Don Ellis en 1962. Ensemble ils joueront notamment sur l’album « Form ». Les musiciens étirent les sonorités les rythmes, brisent des trajectoires mélodiques pour créer un effet de surprise. L’espace sonore est bien différent du Be-Bop ou du Swing. Entre chromatismes et de multiples respirations, ce Jazz aspire aspire encore plus à la liberté qu’auparavant.
Sur « Donkey » on entend une belle ligne de basse puissante sur laquelle le pianiste varie entre débits de notes importants et quelques notes, dont lui seul sait comment les trouver. Lorsque le trompettiste prend le solo, le pianiste se montre très à l’écoute.
Les expériences se multiplieront notamment avec Annette Peacock où la musique sera presque spirituelle, incantatoire notamment sur « Dual Unity » de 1972. Cette ambiance sonore est presque hypnotique.
A cette époque on trouvera également les enregistrements avec Pat Metheny Bruce Ditmas et Jaco Pastorius. Le disque s’appelle « Vashkar » et les musiciens s’immiscent dans une musique électrique presque cosmique et Free par certains côtés.
En 1989, le trio avec Steve Swallow et le saxophoniste Jimmy Giuffre se reforme pour « Life Of A Trio » produit par Jean Jacques Pussiau. Les nappes de piano expriment une certaine froideur traduisent le doute la remise en question essentielle dans la vie d’artiste de Paul Bley.
La même année il sera aux côtés de Charlie Haden lorsque le Festival de Montréal invite le contrebassiste pour plusieurs jours.
En plus d’être un innovateur, il sera friand de rencontres avec de nombreux bassistes et batteurs. Il jouera en duo avec Niels-Henning Ørsted Pedersen pour une magnifique conversation emprise de gravité de songe et d’imaginaire.
Son langage out, l’improvisation libre constituent une révolution pour l’époque. Il est avec Bill Evans un des précurseurs du piano moderne mais ses combinaisons rythmiques et harmoniques sont sa signature. Quand Bill Evans cherchera plus la mélancolie et la poésie, Paul Bley cherchera le lyrisme dans la déstructuration.