Cet album innovant mal accueilli par la presse à l’époque, sera pourtant l’un des albums les plus vendus de l’histoire du Jazz. Le pianiste Dave Brubeck bouleversa l’esthétique du Jazz en usant de rythmes peu répandus. Cet album de 1959, ne regroupe que des compositions, aux métriques essentiellement asymétriques ou impaires. La complexité des compositions sur le plan rythmique et mélodique, ouvre une nouvelle voie. Cette session historique s’ouvre avec « Blue Rondo à la Turk » une composition au rythme surprenant. Le thème est un motif construit sur un débit de notes élevé. Le piano commence tout seul pendant deux mesures, puis se joignent à lui, la contrebasse et la batterie. Le saxophone alto Paul Desmond rejoint le groupe sur le motif. On entend bien les accents orientaux de ce morceau, dont la structure est étendue. Le solo de saxophone commence sur un aller retour entre la métrique impaire, et celle à quatre temps. Avec ce souffle doux, le saxophoniste livre un solo aux notes limpides et souples. Dave Brubeck ponctue son improvisation d’accords plaqués avec dynamisme, et de notes très blues. Entre deux motifs du thème au rythme fascinant, la magie du sax revient pour des petits solos. Le pianiste introduit « Strange Meadow Lark » avec beaucoup de grâce et de sensibilité. Ses accords nous emportent. Le thème est un joyau mélodique joué sur un tempo cool, avec de nombreuses respirations. La mélodie au saxophone est grandiose par la délicatesse et l’emotion. À ma connaissance, Bud Shank est le seul autre altiste à avoir cette sonorité si fine, exprimant une certaine fragilité. La musique de Dave Brubeck difficile sur le plan rythmique, n’impressionne pas par la technique mais par les émotions qu’elle apporte. Le troisième morceau est peut être le plus connu. « Take Five », morceau en cinq temps, commence par la batterie de Joe Morello qui installe le rythme. Le piano joue une boucle sur deux accords puis le saxophone expose la mélodie de vingt quatre mesures. Une première partie de huit mesures est suivie d’un pont de huit mesures, qui lui même retombe sur la partie du début. « Three To Get Ready » est une valse très joyeuse. La composition sera reprise par Claude Nougaro sous le titre » Le Jazz et la Java ». La mélodie douce servie par l’alto, est accompagnée par le piano discret. La quête de mélodie est toujours au centre de la musique du quartet. Le piano développe des phrases sobres. « Kathy’sWaltz » est une autre composition calme et intimiste où s’entremêlent rythme à quatre temps, et à trois temps. Le passage d’une métrique à l’autre illustrent l’aisance des musiciens dans ce domaine. Le saxophoniste est comme un oiseau qui souffle sur les notes. Le swing d' »Everybody’s jumpin » apaise, les balais de batterie croustillent. Aux notes du saxophone, répond le piano jouant des accords en syncopes. Les voicings en triolets, dynamisent l’ambiance et contrastent avec la mélodie épurée. Le pianiste reprend les ponctuations d’accords syncopes sur son impro. « Pick up Sticks » commence par un motif de contrebasse d’Eugène Wright qu’il joue en boucle tout le long du morceau. Dave Brubeck insère avec énergie un accord énergique qu’il décline Cet album se classe selon moi, dans l’esthétique Cool, suscitant l’émotion à travers l’inventivité des thèmes et des improvisations. Le son des instrumentistes est agréable doux et tranquille, les thèmes sont d’un grand raffinement.
LE GROOVE DE BETTY DAVIS
La discographie de Betty Davis est mince, mais son retentissement fut grand. Betty Davis réalisa quatre albums de Soul Funk entre 1973 et 1976.Dans cette