Celui dont nous vous parlons aujourd’hui fut un prodige, peut-être le plus grand batteur de Jazz pour beaucoup de musiciens.
À 17 ans, Anthony Williams jouait déjà avec les grands musiciens de Hard Bop comme l’altiste Jackie Mclean sur l’album « Vertigo » ou le trompettiste Kenny Dorham et son disque « Una Mas ».
Ce rythmicien exceptionnel fait partie du second quintet de Miles Davis à partir de 1963. Son premier enregistrement a lieu lors de l’enregistrement de « Seven Steps To Heaven ». Son jeu sur « Joshua » est déjà très impressionnant pour son jeune âge. Sur ce morceau à la structure peu répandue de 44 mesures, on entend un drive impeccable, des variations incessantes sur une métrique qui sur une seconde partie passe en trois temps pendant quatre mesures.
Sur la version de Miles Davis de « Footprints » datant de 1966, le batteur offre un florilège de polyrythmies incroyables sur les cymbales, en allant du binaire au ternaire.
Selon Miles Davis, Tony Williams était la pierre angulaire du quintet, lui qui donne la pulse varie les rythmes sans arrêt. Il était le roi des polyrythmies capable de varier très souvent son jeu de mesure en mesure.
Pour l’époque, il sera un rythmicien qui ira plus loin que ses aînés, ses maîtres tels Max Roach, Art Blakey et Elvin Jones.
Il est l’un des batteurs ayant le plus exploré les polyrythmies. Des enregistrements live aux disques studio il étonne, il surprend.
En leader, il sortira »Lifetime » en 1964 puis « Spring » en 1965 deux disques chez Blue Note. En plus d’être un batteur de génie Tony montre sa quête d’un ailleurs un Jazz abstrait fondé sur une certaine deconstruction.
Le saxophone et son magma de notes emmène la rythmique vers des coins inconnus. Sur ces deux disques, le batteur continue de voyager sur la voie qu’ont commencé à creuser des gens comme Eric Dolphy, Andrew Hill ou Bobby Hutcherson.
Sur « Lifetime », il expérimente le quartet avec deux contrebassistes Ron Carter et Gary Peacock. Le batteur se lance dans ce qu’on appelle l’improvisation libre.
« Love Song » extrait de « Spring » est un bel exemple de mélodie sur laquelle on tente des contorsions ryhmiques et harmoniques.
Plus tard, il sera l’un des précurseurs du Jazz Rock en montant « Lifetime » un des premiers groupes de Fusion avec John Mclaughlin et Larry Young.
Sur le morceau « Emergency », le batteur commence par une mitraillette de frappes. Le toucher est puissant et la technique époustouflante.
En 1972, le solo de plus de sept minutes en trio avec Stanley Clarke et Jean Luc Ponty mérite qu’on s’y arrête quelques secondes.
La grosse caisse monte en intensité le son sur les cymbales monte également en puissance. Tony Williams va ensuite sur les toms et son jeu évoque les sources Africaines. La suite du solo alterne entre débits de frappes énergiques et séquences plus en finesse. Pendant 8 minutes et vingt secondes, le batteur vous interpelle par son jeu.
En 1975, « Believe It » il sort un grand disque de Jazz Rock avec son « New Lifetime ». Il vous plonge dans une ambiance cosmique et ce dès le premier morceau « Snake Oil ».
Le guitariste Allan Holdsworth stimulé par la frappe puissante lance des riffs ravageurs.
La frappe de Tony ses breaks sont metronomiques.
Sur le morceau « Fred », les accords de clavier sont apaisants mais les roulements sur les toms ainsi que la maîtrise de la grosse caisse, illustrent la technique du batteur.
« The Joy Of Flying » disque de fusion est plus Disco Funk.
Le morceau « Tony » est au depart un régal de groove quand la basse le clavier et ses cocottes vous imprègnent.
Avec le morceau « Coming Back Home », on assiste à la Fusion entre Tony Williams et George Benson.
Il n’abandonnera pas le Jazz acoustique et rejouera avec Herbie Hancock et Ron Carter sur les disques « Third Plane » et « The Herbie Hancock Trio », au cours duquel « Watch It » mélange binaire et ternaire et « Milestones » est une tornade de voicings de walkin et de frappes de batterie.
Dans les années 80, il compose un groupe avec les jeunes musiciens de l’époque comme le saxophonistes Bill Pierce, le trompettiste Wallace Roney, le pianiste Mulgrew Miller et le bassiste Ira Coleman.
Au sein de ce quintet, il montrera toute la liberté à l’intérieur des mesures en changeant sans arrêt les cellules rythmiques.
En 1986, il joue dans le grand film de Bertrand Tavernier « Round Midnight » une référence pour les films sur la musique.
Participant au VSOP Quintet, il retrouvera ses camarades de l’ére Davisienne et enregistrera avant sa mort « Wilderness » en compagnie d’Herbie Hancock, Stanley Clarke, Mike Brecker et Pat Metheny.
Sur cet album, on entend des moments de Fusion avec du Jazz Funk mais aussi des plages plus intimistes comme « Harlem Mist 55 » ou « The Night You Were Born » dédié à Anna Maria Shorter.
Véritable innovateur, Tony Wlliams a fait changé l’approche des Jazzmen sur la batterie. Plus qu’un simple instrument rythmique, la batterie offre des sons comme des notes.
Repoussant les limites de son instrument, Tony Williams développera un jeu très personnel et précis, qui influencera par la suite des générations de batteurs. Ce grand monsieur qui cherchait à surprendre restera sans doute le plus grand batteur du Jazz moderne.